Chapitre 19: Nos peurs profondes
 
 
Je me réveille lentement, nous sommes dans une plaine, en plein nuit, je remarque qu’on n’a panser mes blessures et qu'un feu est allumé avec le trio tout autour. Je soulève mon tronc avec effort, j’ai encore mal et suis très fatigué, je parviens à me mettre assis quand le trio me remarque, ils se lèvent et s’approchent de moi.
 
- « Enfin Réveillé ? » demande Aymerix

Kelvir souris- « Juste à l’heure pour le repas. »

Mathius me tend amicalement la main- « Allez, donnes moi la main et joins-toi à nous. »
 
Mathius veut m’aider à me lever, Mathius le barbare, Mathius l’humain… La peur monte en moi et j’essaie de m’éloigner.
 
- « N’approchez pas ! Eloignez-vous de moi !»

- « Bah, qu’est ce qui te prends ? »

- « J’ai bu du sang humain, et j’ai envie d’en reprendre. Ça te va ? »

- « Mais je… »

- « Pas un pas de plus ! »

Ils restent là, silencieux, Kelvir dit à Mathius.
 
- « Laissons le Mathius, ce qu’il a vécu ne s’efface pas en un jour et un sevrage non plus. »

- « … D’accord, rejoins-nous quand tu auras retrouvé la volonté que tu avais il y a peu. »
 
Le trio s’éloigne et je me mets dos à eux, l’air sombre, regardant longuement les étoiles. La volonté que j’avais il y a peu ? Je m’en souviens, j’avais dit que j’y arriverai, que je pourrais rester le même, mais ai-je raison ? Et si j’échoue ? C’est un risque trop grand, mais pourtant, quelque chose me dit que je peux encore vivre… Est-ce mon intuition ou le sang vampirique qui commence à me corrompre ? Que dois-je faire ? Comment vivre avec cette peur en moi.

Quelqu’un approche, c’est Aymerix, avec du sang, il s’assoit à mes côtés et me tend le récipient.
 
- « Je croyais vous avoir dit de ne pas m’approcher. »

- « Je n’ai pas d'ordre à recevoir de toi et au cas où, je te tuerais avant. Aller, bois ou je te casse une cote pour t’y forcer. »

- « C’était bien la peine de me faire évader. »

Je prends l’offre du semi-démon et boit le sang animal. Je me sens nourris, mais en manque de quelque chose… c’était insuffisant, comme je m’y attendais, ce sang me semble amer, illusion provenant de mon envie de sang humain.
 
- « Alors ? Ça va mieux ? »

- « Pas vraiment non, je suis devant le point de non-retour je peux à tout moment le franchir. »

- « Et ce n’est que le début, le sevrage sera long, Raborin continue indirectement à te torturer, mais si tu t’en sors, tu détruiras tous ces efforts ! »

- « Pourquoi êtes-vous venus me chercher ? Vous auriez pu mourir. »

- « La réponse est évidente, tu es un ami. Après ta capture, nous avons craint le pire. Nous t’avons cherché partout et suivi plusieurs pistes, le reste, j’ai d’abord été en éclaireur pour tuer un maximum de gardes donc du coup, ce n’étais pas si dangereux que ça. »

- « Un ami ? C’est comme ça que tu me vois ? »

- « Qu’on te vois, même Kelvir te vois ainsi. »

- « Tu parles d’un ami, même si je réussis à me sevrer, il y a aura toujours cette peur en moi. »

- « Tu as peur que ton héritage vampire te submerge et te fait commettre l’irréparable et trahir ainsi ceux qui t’on fait confiance. »

- « Exactement. »

- « Je comprends parfaitement… »

- « Ça m’étonnerais. »

- « Que tu crois, je peux te comprendre mieux que quiconque, car moi aussi j’ai peur. »

- « Peur ? Toi ? C’est plutôt tes ennemis qui ont peur. »

- « Je suis moitié démon, j’ai été élevé à Odive mais je ne sentais pas à ma place, j’étais seul, tout le monde se méfiait de moi, alors je suis allé dans l’empire pour trouver ma place et des réponses, savoir si j’avais fait le bon choix. Voir le comportement de mes frères de race m’a dégouté et j’ai appris que mon père avait, comme tous les démons, violé ma mère, humaine et celle-ci s’est enfuis jusqu'à Odive avant de mourir d’épuisement. Je ne pouvais pas devenir comme eux, et je voulais tracer mon chemin. C’est en me glissant dans un régiment que je me suis enfui de l’empire, par la suite, la troupe s’est retrouvé à combattre Kelvir et Mathius, c’est là que j’ai décidé d’agir en tant que moi-même. C’est comme ça que j’ai commencé à faire mes preuves et j’ai finalement réussis, comme tu as pu le voir. Mais depuis, j’ai peur... Peur de moi-même. Je combats comme un démon, avec une immense sauvagerie et ce type de combat me plait, mais j’ai peur d’être emporté par ce sentiment et de me mettre à tuer tout le monde. »

Je suis impressionné, le grand Aymerix, celui qui combat l’empire et qui provoque la peur chez les autres a peur de sa propre force. Oui, il peut me comprendre, on est les mêmes, nous voulons vivre avec nos héritages selon notre volonté, mais nous avons peur d’être dépassé par elle.

- « Nos peurs profondes, sont identiques, nous avons l’impression d’avoir une bête en nous. »

- « Oui, ce n’est pas facile de vivre avec cette angoisse tous les jours. »

- « Ecoute Aymerix, voilà le marché : protège-moi de moi-même et je ferais pareil pour toi. »

- « Ma foi, c’est une bonne affaire, marché conclu. Allez viens, on va rejoindre les autres » dit-il en se levant et me tendant sa main.

Je prends sa main et il m’aide à me relever, avant de rejoindre Mathius et Kelvir. Aymerix est un homme bon, sûr de lui mais qui a ses propres doutes. Il me comprend et je peux le comprendre, sans le voir, Aymerix est le premier habitant de Drael’strom à devenir mon ami et peut être le dernier si je me suicide.


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